Et si les touristes devenaient des voyageurs ?
Qu'est-ce qui nous pousse au fond à refaire à la chaîne, Tous, les mêmes photos qu'on a vu par centaines ?
Cette vidéo, déjà visionnée plus d’un million de fois publiée sur la chaîne YouTube de 100% Pure New Zealand se gausse des effets néfastes des influenceurs, personnalités populaires qui trustent les médias sociaux et incitent le voyageur lambda à se ruer aux mêmes endroits, pour prendre les mêmes photos. Vous ne l’avez pas vue, cliquez ici !
Un comédien, Tom Sainsbury, y joue le rôle d’un fonctionnaire de la "Social Observation Squad " (SOS, tout un symbole) qui traque les touristes sur les lieux emblématiques et les empêche de prendre les mêmes photos que celles des influenceurs. « Ils ont vu ces photos sur les réseaux sociaux et s’empressent de les copier ». Appelant à sortir des sentiers battus et ne plus voyager exclusivement sous l'influence sociale, il ramène ce couple en ville pour « vivre et partager quelque chose de nouveau », rappelant qu’il y a « tellement de choses incroyables à faire en Nouvelle-Zélande, au-delà des tendances sociales".
Ce pays, comme toute notre planète est tellement riche d'endroits fascinants, de rencontres improbables ; pourquoi chercher à nous inciter à « voyager sous l'influence sociale » ? A quoi bon se restreindre ou se fixer comme unique objectif de copier ces influenceurs, s’agglutiner aux mêmes endroits et prendre fièrement le même cliché ? Le risque, en devenant influenceur serait par viralité de transformer à son tour un lieu authentique en futur « cluster » d’over tourisme !
Bien sûr, nous avons vu des photos d’amis tentant de redresser la tour de Pise, mettant leur doigt sur le sommet des Pyramides, servant la Tour Eiffel sur un plateau ou jouant à Gulliver et Lilliput avec l’effet de perspective de Salinas Grande ! On raillait alors les touristes japonais qui mitraillaient tout sur leur passage et attendaient de développer leurs photos pour savoir si leur voyage était réussi ! C’était une autre époque, on voyageait moins, les effets pervers du tourisme industriel nous étaient inconnus.
Cette chanson de Bénabar résume assez bien le phénomène …
Qu'est-ce qui nous pousse au fond à refaire à la chaîne,
Tous, les mêmes photos qu'on a vu par centaines,
Des photos de monuments qui n’sont jamais très belles,
Mais c'est nous qui l'a fait, c'est pas la carte postale !
Les photos de voyage à l'autre bout de la terre,
Les mêmes paysages, des mêmes belvédères.
Nous sur un chameau, nous au ski en hiver,
Re-nous sur un bateau Et les épices du souk du Caire.
Re-re-nous à Pâques, y a deux ans déjà,
Re-re-re-nous à la Toussaint à côté d’Etretat.
C'est vrai qu’on ne voit pas bien, que la photo est mauvaise,
Mais par la salle de bains, je te jure on devinait les falaises !
Et ces photos souvenirs qu'on stocke acharnés
Pour pas qu'on puisse nous dire qu’on n’a pas profité.
Rangées dans un tiroir celles qu'on veut plus voir
Et classées dans des livres des photos d'archives.
Qu'on les range en vrac, qu'on les colle au mur,
Au fond d'un portefeuille ou dans un disque dur,
Au fin fond de la Creuse, à Paris 16ème,
On prend les mêmes poses, nos photos sont les mêmes.
Qu'on soit le frère, la sœur, les parents, la tante,
Toujours les mêmes photos, mates ou brillantes :
Des images inutiles sur toutes les vieilles pierres,
Le Mont-Saint-Michel… Et les épices du souk du Caire !
Parce qu’il ne faut jamais oublier ce qui les différencie : le voyageur explore pour découvrir de nouvelles choses, et éprouver des sensations qui lui étaient inconnues, tandis que le touriste visite pour voir à son tour ce que tout le monde a vu. Alors méditons cette illustre citation de Nahman de Breslev : « Ne demande jamais ton chemin à celui qui sait…. Tu ne pourrais jamais te perdre »